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jardin secret
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17 mars 2010

Les larmes d'une mère.

Tous les parents savent bien qu'il est difficile d'être parent. On souhaiterait faire les meilleurs choix pour nos enfants et les protéger. Mais jamais aucune garantie ne s'offre à nous. Prenons nous le bon chemin, faisons nous le bon choix ?  Seul l'avenir nous le dira...peut-être nous laissera-t-il sur le bord du chemin avec nos regrets...mais c'est à nous qu'il revient de faire ces choix.

Je revois les larmes de cette maman, face à la décision qui lui revient de droit. Cette émotion qui la submerge quand elle en parle. Ces espoirs qui s'amenuisent.

Elle a compris, depuis quelques années que son enfant n'était pas comme les autres. Elle a accepté la différence, accepté le handicap. Elle cherche des réponses physiologiques au handicap de son enfant. Elle veut comprendre pourquoi son enfant présente de tels troubles de la mémorisation, pourquoi comme ses petits camarades, il n'a toujours pas appris à lire, malgré son deuxième CP, pourquoi les autres et pas lui ?

Pourquoi tout est-il si difficile sur son parcours ? Pourquoi nommer une couleur sans se tromper, pourquoi réciter une poésie n'est pas de l'autre du possible ? pourquoi ?

Autant de questions sans réponse...

Peut-être a-t-elle espéré un temps que l'éducation nationale pourrait aider son enfant à surmonter toutes ses difficultés ? 

J'ai essayé, je vous jure, seule dans ma classe pendant de longs mois, de trouver une accroche pour la lecture. J'ai essayé ...j'essaie toujours. Mais je suis face à une abîme...c'est comme si l'on construisait chaque jour un beau château de sable, magnifique, plein de tours..et que tous les matins la mer le détruit. C'est un peu ça mon quotidien professionnel avec Baptiste. On tente de poser les jalons, mais tel un château de cartes, ils s'effondrent.

Je n'ai pas trouvé la bonne accroche, je n'ai pas toutes les billes pour relever un tel défit...je suis toute petite face à un tel handicap...je ne suis pas capable de l'aider à le surmonter.

Je me raccroche comme ses parents aux petits progrès qu'il a fait dans certains domaines. Petits pour nos yeux de grands mais immenses pour lui. Et que d'efforts  ! 

Mais je sais aussi qu'une classe banale ne pourra plus rien lui apporter. Il lui faut une structure plus spécialisée, avec un enseignant bien mieux formé que moi pour faire face à la difficulté. 

Mais ces structures font défaut. La France ne sait pas accueillir ses enfants handicapés. L'éducation nationale toujours à la recherche du moindre coût dit : "intégrons, intégrons ! " Quelle désillusion ! Quelle souffrance pour les enseignants, les parents et les enfants !

Alors l'éducation nationale ouvre (et en ferme aussi beaucoup) des classes d'intégration, des cliss. On y accueille des enfants présentant différents troubles, dans des classes à effectif réduit. On tente de les intégrer dans des classes banales, pendant quelques heures dans la semaine. On leur offre normalement un enseignement spécialisé  avec un enseignant spécialisé. Pour certains enfants c'est la bonne solution, pour d'autres leur place n'est pas là...mais où ? dans quelle structure ?

Certains enfants accueillis dans ces classes  présentent des graves troubles du comportement pouvant les conduire à être violents. D'autres sont des enfants ordinaires avec des troubles des apprentissages, certains présentent un handicap bien défini, d'autres sont "inclassables"...tous arrivent en cliss généralement après un deuxième CP

Mais les places sont chères dans ces classes et il faut prendre la décision assez vite dans l'année.

A la fin de son premier CP, une cliss avait déjà été proposée pour Baptiste. Mais les parents ont souhaité se donner une année de plus. Il est donc arrivé dans ma classe pour son deuxième CP. Cela fait presque 7 mois que nous travaillons ensemble. J'espère avoir apporté ma petite pierre à l'édifice de Baptiste. Ce qui est sûr, c'est que ce petit garçon du haut de ses 7 ans, m'a conquise ! Baptiste malgré toutes ses difficultés, c'est la joie de vivre personnifiée ! Un rayon de soleil ! Toujours heureux de venir en classe...parfois fatigué de tant donner.  C'est assez difficile d'expliquer ce que je ressens pour lui. C'est un enfant qui dégage de l'amour ! Il est gentil, généreux, bon, avec un sens de la justice très développé.Il sait se faire aimer des autres...un don naturel, un beau don.

C'est aussi pour cela que sa maman craint de le laisser aller en cliss. On entend tellement de choses sur ces classes...qu'elle a peur qu'il soit confronté à la violence...qu'il devienne violent à son tour. Elle et son mari sont à la croisée des chemins...ils doivent prendre une décision : continuer sur la voie "normale" ou s'orienter vers la voie "spécialisée" avec toutes les incertitudes. Je comprends leurs doutes et leurs questionnements. Je comprends la pression qu'ils doivent avoir sur leurs épaules...je comprends que ce choix qui leur appartient les angoisse. 

Et ce que je comprends surtout, c'est que la France, l'éducation nationale ne sait pas gérer le handicap !

J'aimerai l'espace d'un instant avoir une boule de cristal et pouvoir dire nous avons fait le bon choix.

Mais la seule chose que je puisse dire, c'est que nous avons fait le seul choix réaliste que nous pouvions faire.

 

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Commentaires
P
> Pancho<br /> Mon inspectrice m'a dit récemment :<br /> "A l'impossible nul n'est tenu !"<br /> C'est sympa quand on se plaint de se sentir démuni face à la grande difficulté scolaire.<br /> > Stéphanie<br /> On a avancé à petits pas, mais c'est mieux que rien.
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S
Chapeau à toi pour l'énergie déployée, en tout cas!!
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P
Je crois qu'on est presque tous concernés (enseignants) par de tels questionnement, au moins de temps en temps, et ça va devenir de plus en plus fréquent..C'est vrai que c'est plutôt frustrant de ne pas trouver de solution à un pb d'apprentissage quand on est payé pour!!<br /> Faut-il accepter de ne pas être Dieu le Père..?
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