Les antipodes
La semaine dernière, je devais voir une maman pour parler redoublement. Ce n’est jamais un exercice facile. Mais l’entretien a tourné court et vinaigre lorsque la mère m’a dit d’emblée : “Si c’est pour un redoublement c’est non ! “. Je lui ai donc tendu la feuille de notre inspection en lui précisant quelle case elle devait cocher si elle était contre…et l’entretien a pour ainsi dire pris fin. J’étais frustrée, en colère qu’elle n’ait même pas pris le temps d’écouter mes arguments. Je n’ai pas l’intention d’aller jusqu’en commission. Comme je l’expliquais à la maman, je lui donne mon avis de professionnel mais après c’est son choix et sa responsabilité.
Je m’attendais de toute façon à son refus. Son aîné a lui aussi redoublé le CE1 et il est toujours en échec scolaire.
Hier, elle est revenue…pour s’excuser, ayant pris conscience qu’elle avait peut-être été un peu brusque dans sa réponse. Elle n’a toujours pas changé d’avis, confortée par l’orthophoniste qui va dans son sens. Mais j’ai pu placer mes arguments, lui expliquant que je voyais sa fille 6 heures par jour en situation de classe, ce qui n’est pas le cas de l’orthophoniste qui la suit une fois par semaine depuis quelque mois. Je vous avoue que cela m’agace assez cette intrusion que se permettent certaines orthophonistes sur les jugements professionnels des enseignants. C’est pourtant un métier que je respecte, mes enfants étant eux-mêmes des grands clients de cette profession…
Pas de changement donc…l’enfant ira au CE2, malgré le fait que je sache pertinemment que son année prochaine sera vouée à l’échec. Mais ma colère est tombée. Je ne peux pas en vouloir à cette mère de faire ce qu’elle croit le mieux pour sa fille. Je lui ai simplement dit de garder cela dans un coin de sa tête car le problème ne pourra que se reposer au regard des lacunes de sa fille.
Mais je sais qu’être mère n’est pas chose facile. J’espère juste que cette famille aura pris enfin conscience des difficultés réelles de l’enfant.
Autre jour, autre rendez-vous. Je reçois, cette fois, le papa d’un petit garçon de ma classe. Elève brillant, vif, intelligent…que du bonheur pour une instit et pour des parents. Je propose à la famille un saut de classe avec passage direct l’année prochaine en CM1.
Je sens la fierté dans les yeux du père. J’observe cette main passée dans les cheveux du fiston, j’entends cette voix qui dit à son fil : “Je suis fier de toi” !
Une pointe de jalousie m’envahit…que ma vie de maman serait si simple si mon fiston réussissait si brillamment à l’école…plus de dispute au moment des devoirs, des dictées préparées en 5 minutes…Fiston comprend vite mais peine au passage à l’écrit. Ajoutez à cela un grand manque de concentration, de motivation, il faut bien le dire aussi, quelques confusions de sons et les préparations aux dictées relèvent du défi !!!!
Fillette, quant à elle, suit son petit rythme. Son principal défaut, elle manque de confiance en elle et se ferme devant l’adulte de l’école. Toute timide, ma grande bavarde…toute timide en classe cette demoiselle qui ne cesse de me réclamer des câlins.
Et oui, être parent ce n’est pas toujours simple. Mais qu’importe ce sont nos enfants. Nous les acceptons tels qu’ils sont et nous ferons toujours pour eux ce que nous croyons être juste.
Et nous nous planterons, c’est sûr…la vie serait trop simple sinon. Mais ce sont nos erreurs qui nous font avancer et leurs erreurs qui feront d’eux des adultes responsables.
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