enseignant et parent : un gouffre ?
J’ai les deux casquettes : enseignante et parents d’élèves…Mes enfants étant très jeunes, je baigne dans le second rôle. Je pense que parfois cela m’aide à comprendre les réactions passionnées de certains parents. On ne peut pas réagir avec tout le calme et le recul qu’il faudrait lorsque nos enfants sont impliqués. Et pourtant il serait parfois salutaire d’être capable de le faire. De se dire posément que la maîtresse n’est pas un monstre, qu’elle n’en veut pas à notre enfant en particulier et que somme toute une petite punition ne fait de mal à personne. Que tout enfant a des règles à respecter et que oui, les enseignants se fâchent parfois et donnent des punitions. Bien entendu l’enseignant est un être de chair et de sang, un être qui ressent, un être qui parfois se trompe. L’erreur est humaine. Nous ne lisons pas la vérité dans les yeux des enfants, notre « tribunal » est sommaire et des erreurs judiciaires doivent se produire…Bah, qui n’a pas été victime en son jeune temps d’une erreur de jugement de nos très hauts enseignants ? Qui n’a pas eu le sentiment d’être un coupable innocent ?…Cela nous est arrivé, nous avons été punis et aujourd’hui nous poursuivons une vie d’adulte responsable, non traumatisée par nos années scolaires. Je sais aussi qu’il existe dans le milieu de l’éducation des maîtres et maîtresses que l’on ne souhaiterait pas à ses enfants. Il en existe qui ont traumatisé des élèves ! C’est vrai. Mais il faut savoir relativiser les choses. Je suis désolée de dire qu’à l’heure actuelle, certains parents sont procéduriers. Il existe une sorte de barrière entre l’école et eux et l’enseignant en veut à leur enfant. C’est un gouffre profond créer par une incapacité à mettre des mots sur des choses simples et à s’expliquer clairement et calmement. L’enseignant peut avoir sa part de responsabilité car l’enseignant est susceptible. Nous faisons quoiqu’en pense certains un métier difficile.
Je fais ce métier depuis plusieurs années, je l’aime, j’aime mes élèves même si parfois ils m’exaspèrent. J’aime ce métier même si parfois il ne nous le rend pas. J’aime ce métier même si parfois je voudrais hurler face à certains parents.
J’aime ce métier mais il y a des jours où le vase déborde alors par pitié parents, cessez de venir vous plaindre dès que nous haussons un peu le ton, ou dès que nous donnons une punition !
L’école a évolué, les mentalités des enseignants aussi et il est rentré dans toutes les mœurs qu’un enseignant ne doit pas frapper un enfant et fort heureusement. Mais ne rentrons pas non plus dans le processus inverse et laissons aux enseignants de nos enfants un moyen de « répression ». Nous avons face à nous des enfants d'âge varié. Nous en avons de 20 à 30 par classe et il faut bien instaurer des règles et des sanctions pour que les enfants travaillent dans un climat serein et se préparent à leur vie d'adulte. Je pense de plus en plus sincèrement que ce sont certains parents qui causeront la perte de l’école. Que certains ne préparent pas leurs enfants à devenir des adultes responsables et à prendre conscience que quelque soit notre statut nous avons tous au dessus de nos têtes une autorité. Et dans une école, l’autorité c’est l’enseignant et le directeur d’établissement. Et que respecter des règles c’est aussi ce que l’on nous apprend dès notre plus jeune âge. Alors bien entendu il est bon de faire connaître son bon droit et de dénoncer des situations abusives, mais ne tombons pas dans les extrêmes. J’ai déjà eu des mots de parents me signifiant que non, l’enfant ne fera pas la punition pour X raisons…(pour saper une autorité c’est parfait). Dans d’autres cas, j’ai des parents qui m’écrivent pour m’informer que je dois garder leur enfant en classe pendant la récréation car il est puni !!! Dans tous les cas j’apprécie fortement que l'on me dise ce que j'ai à faire… (ironie)
Nous avons une formation (qui pourrait être meilleure j’en conviens), mais nous sommes des professionnels. Nous faisons de notre mieux, même si notre mieux n’est pas toujours suffisant, parce que certains enfants auraient besoin de classes spécialisées, de rendez-vous chez des spécialistes…mais que rien n’est fait. Car nous ne sommes pas des assistantes sociales, car il n’est pas de notre devoir de donner la main aux parents pour qu’ils prennent un rendez-vous. Que dire de plus à une maman, à qui depuis plus d’an, on demande de prendre un rendez-vous pour son fils chez un psycho-motricien et qui ne le fait pas car il faut prendre une journée ! Et ce serait à nous de faire des miracles, là où les problèmes sont plus profonds…
J’ai conscience à travers tous ces mots que j’aligne, que je brasse bien des problèmes à la fois. Que ce qui m’a fait écrire au début est loin de toutes ses préoccupations et que somme toute ce mot dans ce cahier et bien ce n’est pas grand-chose…Mais c’est parfois, un tas de petites choses qui font les grandes.
J’ai passé à mes élèves il y a quelques semaines un petit sac plastique contenant 2 magazines et une offre d’abonnement. J’avais 5 sacs, 24 élèves, donc de ma belle plume j’ai rédigé un petit mot expliquant aux parents que le sac devait revenir le lendemain à l’école. Je l’ai expliqué à mes élèves.
H a eu son sac mardi dernier. Jeudi, le sac n’était pas de retour. Je sais que cela peut arriver. Personne n’est à l’abri d’un oubli. J’ai rappelé à mon élève la consigne simple au demeurant. Pas un mot plus haut que l’autre. Vendredi, toujours pas de sac. Je respire profondément, je passe à autre chose. Samedi, il était absent. Lundi, il revient sans son sac. Je lui ai fait copier : je dois ramener mon sac. (Une fois ! il est au CP, un peu d’écriture ne nuit pas). Le lendemain, oh miracle, après avoir relancé les parents sur le cahier de correspondance, je reçois un mot dans le cahier me disant que la faute incombant aux parents, je n’aurais pas dû donner des lignes à leur fils !!!!!!! Alors, je vois rouge ! Que l’on ne vienne surtout pas me dire que j’ai traumatisé un enfant, ou que je l’ai « puni » abusivement. Quelle que soit la part de responsabilité de ses parents ( qui ont signé le mot spécifiant que le sac devait revenir au plus vite), j’estime qu’un enfant de 6 ans peut aussi assumer sa petite part de responsabilité en pensant à ce que lui a confié sa maîtresse…Est-ce vraiment trop demander ?
Alors faut-il maintenant que je punisse les parents parce qu’ils font mal leur travail ????
C’est ce que j’ai voulu mettre dans le gentil mot que je leur ai renvoyé, mais ma directrice m’a freinée et ma réponse est somme toute très zen par rapport au bouillonnement intérieur qui m’agitait. Mais il est vrai que je ne vais pas non plus entrer dans une polémique pour 5 mots que j’ai fait écrire à un enfant…Et vous voulez connaître le comble de tout cela ! Et bien le sac était vide. Plus de magazines !!!!
Affaire à suivre.
Vous voyez bien qu’en soit ce n’est rien. Et voilà comment on arrive à créer des situations conflictuelles pour des broutilles (et je soutiens que oui, l’enseignant est une espèce très susceptible). Maintenant je suis également une adulte responsable, j’ai face à moi des enfants qui ne sont pas responsables de leurs parents. Donc le petit H pourra tranquillement poursuivre sa scolarité dans ma classe, je ne lui tiens pas grief fort heureusement de tout cela. Et si il doit être puni, il le sera encore quoiqu’en pense papa et maman. Mais il ne le sera pas plus qu’un autre (sauf si il fait plus de bêtises qu’un autre, quoiqu’en pense papa et maman).
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